L’architecture du Pays Basque, notamment celle des maisons et fermes basques fascine. “Etxea” signifie la maison en basque. Elle se caractérise par des styles très différents. De Saint-Jean-de-Luz sur la côte basque, à Mauléon-Licharre, en passant par Saint-Jean-Pied-de-Port, je vous invite à une traversée du Pays Basque nord (“Iparralde” en basque).
Nous terminerons ce voyage par une rencontre avec Marie-Christine, Raconteur de Pays.
Les styles de maisons basques
Les premières maisons basques
Vous ne le savez peut-être pas, mais les premières maisons basques étaient réalisées en bois. L’ossature de l’habitation était entièrement réalisée par le charpentier. Il était l’artisan principal des maisons. Ce type de maison était très répandu avant le XVI° siècle.
A partir du XVI° siècle, l’artisan principal des maisons n’est plus le charpentier mais le maçon. On construit alors des maisons en pierres et blanchies à la chaux. C’est la plupart des maisons que vous pourrez découvrir aujourd’hui dans notre région. On distingue aujourd’hui trois types de maisons.
La maison labourdine
Les maisons et fermes basques de la région de Saint-Jean-de-Luz ou encore d’Espelette (le Labourd), sont des maisons labourdines. Comme toutes les maisons du Pays Basque, les murs sont blanchis à la chaux. On les reconnaît aussi grâce à leurs toitures asymétriques, à deux pans, et couvertes de tuiles. Les façades des maisons labourdines sont agrémentées de colombages en bois peints. L’un des derniers éléments qui les différencie de leurs cousines, est le “lorio” : un espace couvert qui est créé par l’avancée de l’étage sur le rez-de-chaussée, dans la construction. Il servait d'abris pour travailler dehors.
Les couleurs des maisons
Le rouge, gorri en basque, correspondrait au sang de bœuf. On l’utilisait pour empêcher que le bois ne pourrisse, et le protéger des éléments. Le vert, berde en basque, viendrait de l’extraction du minerai de fer, très présent dans les sols basques. Le bleu, “urdin” en basque, trouverait ses origines dans le passé maritime de la région. Les familles de la côte basque, qui vivaient beaucoup de la pêche, auraient utilisé les restes des peintures des bâteaux de pêche. C’est d’ailleurs pour cela que les maisons bleues sont plus fréquentent, lorsque l’on se rapproche du littoral.
Rencontre avec Marie-Christine, Raconteur de Pays
Topaketa
Marie-Christine, Raconteur de Pays au bureau d'accueil touristique de Mauléon-Licharre
L'etxea : passé ou présent ?
J’habite Gotein-Libarrenx, petite commune de 497 habitants, située en Soule. La province se trouve au pied des Pyrénées, à une heure des pistes de ski et à une heure trente de l’océan. J’y vis depuis 24 ans. Je ne vis pas dans ma maison familiale dont ma sœur a hérité, prenant en charge notre mère, comme le veut la tradition.
La maison, que l’on appelle « Etxe» dans tout le Pays Basque, est la base de notre société, la pierre angulaire sur laquelle reposait l’édifice politique et social. D’ailleurs, doit-on en parler au passé ou au présent ? Pour ma part, je crois que l’on peut en parler au présent. Encore aujourd’hui, il n’est pas rare de nommer quelqu’un par le nom de sa maison natale. Comme je l’explique lors des visites : l'habitant « appartient » à la Maison, et ensuite il fait parti d’un quartier, d’un village, etc.
La maison souletine
La maison souletine s’apparente à la ferme béarnaise de part sa disposition en largeur et son toit d’ardoises dont la forte pente se termine en coyau. C’est une habitation rectangulaire, sobre, qui abrite de grandes pièces derrières des murs en pierre épais. Au rez-de-chaussée on trouve la cuisine, la salle à manger, utilisée uniquement lors des fêtes ou des réunions de famille, et la grange. Il y a un étage où se trouvent les chambres et ensuite le grenier.
Au dessus de la porte principale, une pierre gravée indique le nom de celui qui a fait construire, ou agrandir, la maison et l’année des travaux.
La plupart du temps elles sont sobres. Parfois, elles sont richement sculptées et retracent la vie du maître de maison :
- il aimait la chasse : on devine une palombe et un personnage qui porte un fusil
- il écrivait des pastorales (ou il avait été acteur) : des personnages sont gravés
- il avait des animaux : on devine une brebis
3 infos méconnues sur les maisons basques
- Dans les maisons de Haute-Soule (Tardets-Sorholus) le grenier est traditionnellement plus petit que dans les maisons de Basse-Soule (Mauléon-Licharre) car le grain récoltait y été moins important.
- Chaque maison a un nom immuable. Il peut être choisi selon le métier que pratiquait le maître de maison ou selon le lieu où elle est bâtie (Karricaburu : au bout de la rue du village).
- Le coyau est une pièce d'architecture typique des maisons souletines. Elle termine les pentes des toitures. C'est une petite pièce de bois biseautée placée sur un chevron afin d'adoucir la pente d'une toiture.
La maison et les basques
Les habitants peuvent porter un patronyme différent de la maison et cela se retrouve sur les tombes. Par exemple, lorsque l’on se trouve au cimetière, on voit le nom « Etchebarneko familia » inscrit sur le fronton de la tombe et, au-dessous, la liste des défunts. Parfois, ils s’appelaient "Etchebarne" mais, souvent, leur patronyme était autre, par exemple Mendy. Cela signifie que la famille Mendy qui habitait la maison Etchebarne est enterrée là.
Dans chaque famille, l’aîné, garçon ou fille, était l’héritier de la maison.
En basque on l’appelle « etxekoa » que l’on peut traduire par « celui qui est pour la maison ». Celui-ci devenait le gestionnaire du patrimoine familial. Il avait le devoir de le faire prospérer et fructifier, il devait prendre en charge ses parents, ses oncles, tantes, frères et sœurs célibataires demeurés au foyer.
Parfois, l’intérêt de la maison exigeait une dérogation pour que ce soit le suivant qui devienne le jeune maître de maison.
Lorsqu’il se marie, sa jeune épouse et lui partage droits et devoirs. Il devient «etxeko jaun gaztia» (le jeune maître de maison), son père restant «etxeko jaun zaharra» (le vieux maître de maison). Il gère tout ce qui se déroule à l’extérieur ; sa femme, elle, devient «etxeko anderia gaztia», la mère restant « etxeko anderia zaharra ». Elle gère le reste : les enfants, le ménage, le jardin, la cuisine….
Les souvenirs et coups de coeur de Marie-Christine
Depuis que je suis Raconteur de Pays, j’ai eu l’occasion de faire partager ma connaissance des maisons souletines et de la culture basque, et de les approfondir.
Nous avons de beaux bâtiments qui « vivent » encore soit parce que les héritiers y vivent toujours soit parce que les nouveaux propriétaires ont su les conserver et les embellir.
Les maisons de villes que l’on trouve à Mauléon-Licharre ou à Tardets-Sorholus témoignent d’un riche passé industriel.
Les fermes que l’on trouve ailleurs en Soule, témoignent d’une vie de labeur où plusieurs générations vivaient sous le même toit.
A Trois-Villes, face au fronton, se trouve une magnifique maison. La première habitation date du XVIIe siècle. Au fil des années, la maison a été agrandie. J’ai connu, vivant sous le même toit, la grand-mère, la grand-tante, le grand-oncle, le père, la mère et le fils. Chacun avait sa place et une tâche qui correspondait à ses capacités. Je me souviens du grand-oncle, vieillissant, qui s’occupait des petits travaux autour de la maison.